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La ville souffle le chaud et le froid sur la Presqu’île Malraux

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La ville souffle le chaud et le froid sur la presqu’île Malraux - Ou quand la langue de bois (rumeur) fait office d’information.

Problématique pour une nouvelle centralité après la présentation du projet d’aménagement des espaces publics du 04/03/2013.

Problématique pour une nouvelle centralité
La presqu’île Malraux constitue incontestablement un enjeu politique fort, pour l’équipe au pouvoir qui semble vouloir imprégner ce lieu de façon forte pour y laisser « sa marque », mais aussi pour les élections municipales à venir car tout ne pourra probablement pas être acté avant. C’est un lieu désigné pour devenir une nouvelle centralité hors du périmètre historique de la ville. Aussi tout ce qui se passe sur ce territoire est emblématique de la réalité des façons politiques de se comporter. Ce lieu est sujet à polémique depuis le début, de ce fait là en particulier.
Ce territoire est situé dans la zone « non aedificandi » qui contrairement à sa partie située entre Elsau, Montagne verte et Koenigshoffen ne sera pas respectée comme le veut la loi (pas plus de 20% d’espaces construits). A l’ouest elle est vouée à devenir un parc naturel urbain, au sud, elle disparaît et sera entièrement urbanisée. Strasbourg a besoin d’espace en ville pour construire.

Espaces publics ou espaces privés ?
Lors de la révision du POS pour rendre cet espace constructible, 4 lots ont été délimités, tous déclarés 100% constructibles. Après une première levée de bouclier face au projet d’une grande tour, ce projet ayant été revu, les lots sont attribués à ICADE, émanation de la Caisse des Dépôts et Consignation avec pour mission de recourir à un concours d’architectes pour le choix d’un nouveau projet. Mais qu’en est-il des espaces entre les objets architecturaux ? Sont-ils privés ou publics ? Madame Fabienne KELLER interroge par deux fois au moins la municipalité à ce sujet sans obtenir de réponse claire (séances des 26/11/2012 et 19/03/2012). Lors de la réunion de présentation du projet d’aménagement de ces espaces le 04 mars 2013, la question a encore été posée et Monsieur Alain JUND affirme que la municipalité a tout pouvoir sur ces espaces. Mais pourquoi avons-nous donc tant de peine à les croire ?
La question se pose d’autant plus pour les résidents des Rives de l’Etoile que leurs propres espaces publics ont encore un statut privé. Ils appartiennent à la SERS qui ne les entretient pas. Mais si elle le faisait, ce serait financièrement sur le compte de l’ASL, c'est-à-dire à la charge du centre commercial et des résidents ! Une façon bien commode de privatiser des espaces publics pour ne pas en avoir la charge de l’entretien. Depuis plusieurs années, devant l’abandon de ces espaces et de leur apparente indigence, une rétrocession à la ville serait envisagée…Quand ?

Les frontières à la démocratie participative
Ce grand projet de construire la ville en concertation avec ses habitants s’arrête au périmètre de la presqu’île Malraux et l’exclue de cette intention. Déjà avant la réunion du 04/03/2013, les Conseils de Quartiers de Neudorf comme celui de la Bourse-Esplanade-Krutenau, s’étaient fortement opposés à la constructibilité de la place Jeanne Helbling sans être entendus.
Aux petits « ateliers de projet » les 27/01/2012 et 07/02/2012, est affirmée la volonté politique de conserver à ce site une dimension portuaire, citant en exemple la ville de Hambourg. Or ce site comme celui de l’Eco-quartier Danube et en partie celui du Heyritz sont des friches industrielles et portuaires. Au Heyritz, avec le temps la nature a repris ses droits, mais l’espace sur lequel va se construire l’éco-quartier Danube ressemble à celui que devait être celui de Rivetoile avant sa construction, et celui de la presqu’île dans sa partie non aménagée ? Alors pourquoi cette rigidité dans le parti-pris de la minéralisation à outrance ? Pourquoi cette pensée unique que rien ne vient infléchir depuis 3-4 ans ?
Mais c’est la réunion du 03 mars qui montre ce parti-pris dans toute sa splendeur. Suite à l’écartement du premier projet d’une seule tour, il avait été demandé à l’architecte Christian DEVILLERS en responsabilité du projet Danube, de venir éclairer ce que pourrait être un nouveau projet Malraux. Ses préconisations avaient suscité un réel espoir d’un projet plus humain :
- 3 bâtiments plus bas (au lieu d’une tour) dont la forme laisse au regard la possibilité de s’échapper vers plus d’horizon pour ne pas fermer le fond de bassin, le faisant ressembler à un lieu clôt. Les hauteurs devant aussi s’harmoniser avec les immeubles de Danube leur faisant face ;
- Un accès à l’eau facilité par le relèvement du niveau du bassin ;
- Une meilleure qualité de l’eau par un système qui ferait circuler l’eau au lieu de la voir stagner et s’emplir d’algues dès qu’il fait chaud ;
- Une rangée d’arbre et pourquoi pas une végétalisation des berges pour rompre avec tout ce béton.

TOUT a été balayé par l’équipe en charge du projet. Il s’agit de la même équipe que celle qui a aménagé l’environnement très minéral de la médiathèque André Malraux.
- Plus question de remonter l’eau, ça coûte trop cher et il y aurait une question d’étanchéité des murs du bassin. Donc on descend vers l’eau en créant une esplanade en bois pour « Strasbourg-plage » coté presqu’île. Les flâneurs auront donc la joie de laisser leur regard se balader sur les façades du cinéma et du parking dont chacun connait la merveilleuse esthétique. Rien n’est prévu pour aménager plus agréablement le passage le long du cinéma. Qui a envie d’y flâner aujourd’hui ? Ce côté a été préféré à cause de l’ensoleillement. Mais nous savons aussi qu’il fait très chaud en été en climat continental et que les gens recherchent âprement tous les coins d’ombre. Il n’y en aura pas ! Mais en dehors des 3-4 mois de « plage » que se passera-t-il sur cette esplanade ? Le bassin déjà amputé en profondeur, voit sa surface encore réduite par ce recouvrement qui l’hiver sera une vraie patinoire. Nous le savons grâce aux passerelles déjà en place. Heureusement il y aura les oiseaux d’eau qui les décoreront un peu car les chaises longues auront disparu.
- Rien de prévu pour traiter l’eau. Nous nous rapprocherons donc des paquets d’algues qui flottent à la surface justement aux moments ou le temps permettrait de profiter de la proximité de l’eau. Pas sûr que ce soit agréable ni à la vue, ni à l’odeur.
- Il est concédé quelques arbres implantés de façon aléatoire. Si l’aléa ressemble aux trois maigres ginkgos du bout de la presqu’île il y a de quoi se faire du souci.
- Le maintien d’une ambiance portuaire ne se décline qu’en poursuivant une minéralisation à outrance selon le modèle hambourgeois qui plait tant à nos élus. Pourtant il nous est concédé une expertise d’usage : il y fait froid l’hiver et très chaud l’été sans de la végétation pour temporiser. On affiche aussi un souci d’écologie et de développement durable. Mais en quoi ? Le site, tel qu’il est conçu, constitue une rupture radicale dans la trame verte qui longe la trame bleue. Entre le Heyritz et Danube, deux espaces urbains ou le travail sur la nature semble vouloir aboutir à une merveilleuse place pour elle en accompagnement de l’urbanisation, Malraux est voué à la pierre, au béton, au métal et au verre, sans vie. A part dans l’eau, il n’y a aucun oiseau sur le site sauf quelques individus qui y vivent en rêvant de plus de nature et de vie.
- Rien ne peut être dit sur les « cygnes noirs » de Madame DEMIANS, nouveau projet architectural sélectionné par les élus. 3 blocs, noirs, fermeront le bassin à l’est car leur forme et leur implantation au sol semble faire buter les passages sur les façades des premiers immeubles de Danube. Cette nouvelle place centrale n’aura même pas l’emprise de rues pour laisser échapper les regards. Mais cette question n’est pas à l’ordre du jour. Nous ne sommes réunis que pour les espaces publics/privés ! Donc rien non plus concernant la place Jeanne Helbling sauf un scénario déjà joué. Il n’y a rien en projet sur cette place avant 10 ans… mais pas d’argent pour la rendre végétale. En même temps, UNIBAIL propriétaire du centre commercial  Rivetoile fait des propositions d’extension qui sont étudiées par la mairie ? Alors construction ou pas ? Monsieur BIES lors de la visite du maire sur ce lieu, et Monsieur JUND lors de la réunion du 04/03 ont laissé tous les deux entendre qu’il n’y aurait pas à terme de construction sur cette place. Monsieur FULLENWARTH de la SERS dit le contraire. Qui croire ? Que croire dans cette cacophonie ? Et morceler les sujets concernant cet espace est-ce aussi une stratégie pour faire passer l’inqualifiable ?

Il ne reste donc rien de ce qui avait suscité de l’espoir dans l’assemblée réunie lors de l’exposé de Christian DEVILLERS. Aucune considération concernant la nature des revêtements au sol alors que celui du quai Jeanne Helbling fait l’unanimité contre lui. C’est un enfer pour les pieds, les poussettes, les vélos et les fauteuils roulants.  Aucune considération concernant l’éclairage aujourd’hui anarchique entre le public et le privé du centre commercial. Ne venez pas sur la presqu’île pour contempler les étoiles la nuit ! Le seul mobilier dont il a été question sont des murets pour s’assoir ; mais regardons les blocs de la place Dauphine ! Utilisés pour faire du skate-board ils sont inutilisables pour s’assoir. Et puis s’assoir c’est aussi pouvoir s’adosser. Les personnes un peu âgées ou simplement le lecteur aimerait sûrement avoir son dos soutenu par un dossier. Mais y aura-t-il des bancs publics, ou simplement des terrasses de café où il faudra payer pour s’assoir ? Ah ! Si ! Nous oublions le projet de fontaines sèches. Hélas celles de la place Dauphine ne prédisposent pas à la confiance. Elles sont très sèches après avoir fonctionné une partie de première saison, et depuis plus !

Quelle déception que ce projet ! La ville entendra-t-elle la demande de revoir la copie ?

PRECONISATIONS
- Une vraie concertation, qui entend l’expertise d’usage des premiers habitants du site dont vous connaissez la fiabilité quand il s’agit de construire avec eux.
- Une réinscription de la réflexion sur les espaces publics de la presqu’île dans un territoire incluant toutes les berges, canal et bassin inclus, entre la cité de la musique et le pont Winston CHURCHILL, sans quoi on ne pourra pas parler d’ambiance dans une nouvelle centralité. Seront donc concernés : les Rives de l’Etoile, la place Jeanne Helbling, le quai le long du cinéma, en plus de la presqu’île.
- Un souci authentique pour réfléchir à la mixité entre une ambiance portuaire et une vraie place à la nature, avec des spécialistes des plantes et des sols comme sur Danube.
- Une réflexion sur la qualité de l’eau dans le bassin qui, sans être améliorée, n’est pas aménageable (création d’une circulation d’eau avec le canal, plantes dépolluantes dans un concept de jardin d’eau comme au Heyritz ?

Micheline CHRISTEN
Présidente de l’Association des résidents des Rives de l’Etoile